Le naufrage de la corvette "La Gorgone"

Extrait  des minutes du Greffe du Tribunal Civil

de première instance séant à Brest Département

du Finistère où est écrit ce qui suit :

               

      Du vingt cinq mai mil huit cent soixante dix.

Audience publique du Tribunal Civil de première instance

séant à Brest, tenue au Palais de Justice rue Voltaire

par Messieurs Dupuy Présisent, Jardin de la Roux

donnage et le Guillou Penanros, Juges assistés de

 Maître  Freund commis greffier,  présent Monsieur Le

Bescond de Craspont; Juge suppléant occupant le

siège du Ministère public.

 

      Le Tribunal : Attendu que le Ministère

public a reçu de la Loi la mission de surveiller la tenue

des registres de l'Etat Civil qui sont destinés à constater

l'état des personnes; qu'il a par conséquent le

pouvoir de provoquer d'office les décisions judiciaires

nécessaires pour combler les lacunes ou omissions , recti

fier les erreurs qui pourraient être signalées dans la tenue

de ces registres, alors surtout que son initiative sollicitée

par des considérations d'ordre public a pour but de

sauvegarder un intérêt  général, bien plus qu'un

simple intérêt particulier.

 

      Attendu qu'il  [……?] de divers documents

fournis par l'Administration de la Marine, des

constatations et enquêtes faites par elle que dans

la nuit du dix huit au dix neuf décembre mil

huit cent soixante neuf, la Corvette la Gorgone a

péri corps et biens dan l'Iroise entre l'île

d'Ouessant et Brest; que les Quatre Vingt

Treize hommes qui composaient l'équipage de ce

bâtiment ont tous sans en excepté un seul péri

dans ce naufrage. Qu'aucun doute ne peut exister

sur ce point et qu'il est du plus grand intérêt  pour

les nombreuses familles des victimes de ce déplorable

désastre que l'état civil de ces victimes soit régulièrement

constaté.

 

      Par ces motifs, le Tribunal , après avoir

délibéré conformément à la Loi :

Vu la requête ci-dessus et les pièces à l'appui,

vu l'avis du Conseil d'état du douze brumaire an

onze de l'article cent vingt deux du décret du dix

huit  juin mil huit cent onze, ouï Monsieur le

 

                           -------------------    

                     

Président Dupuy dans son rapport, le Ministère

public en ses conclusions orales.

      Donne pour constant que du dix huit au dix neuf

décembre mil huit cent soixante neuf dans l'Iroise

entre Ouessant et Brest sont décédés les quatre vingt

treize marins qui étaient embarqués à bord de la

Corvette la Gorgone, au nombre desquels figurait :

Roubaud, Pierre Charles né à Cassis (Bouches-

 du-Rhône) le premier août mil huit cent

quarante un, fils de Lazare  et de Marie Dominge,

quartier maître de timonnerie de première classe.

      Ordonne que le présent jugement tiendra lieu

d'acte de décès pour le prénommé, qu'il sera à cet

effet transcrit littéralement sur les registres courants

de la commune de Cassis et que mention en sera

faite en marge de l'acte de décès le plus voisin  du dix

neuf décembre mil huit cent soixante neuf :

Ainsi jugé et prononcé en audience publique au

palais de Justice à Brest, rue Voltaire, l'an mil

huit cent soixante dix le Vingt cinq Mai.

Signé à la minute Dupuy, Président, Freund,

Commis Greffier. Ensuite est écrit : Visé

pour timbre et enregistré gratis à Brest le deux

Juin mil huit cent soixante dix, folio cent trente

sept, Cases deux et suivantes :

 

      Signé : Salvagniac

 

                Pour expédition conforme

                Pour le Greffier

                Signé Freund

 

                Visé pour timbre et enregistré gratis

à Brest le Vingt Juin 1870 folio 168 C,3

                Signé : Illisible

 

      Transcrit par Nous Maire, officier de l'Etat-civil

de la commune de Cassis le dix Juillet Mil-huit-

cent-soixante dix.

 

                                               Le Maire :

                                               Alexis BŒUF